Donald Trump menace la BBC de poursuites pour diffamation après le montage trompeur d’un discours

Le président américain Donald Trump, sur le point de prendre un avion depuis la base aérienne Andrews Air Force Base dans le Maryland, le 9 novembre 2025.
Le président américain Donald Trump, sur le point de prendre un avion depuis la base aérienne Andrews Air Force Base dans le Maryland, le 9 novembre 2025.REUTERS – Kevin Lamarque

Le scandale a déjà conduit à la démission du directeur général de la BBC, Tim Davie, et à celle de la patronne de l’information du groupe, Deborah Turness. Le président du diffuseur public britannique a présenté ses excuses pour une « lourde erreur de jugement », dans une interview fleuve lundi 10 novembre, où il revient sur le montage controversé, bricolé à partir de deux discours différents de Donald Trump.

Le président américain passe désormais à l’offensive. Dans une lettre, ses avocats laissent à la BBC (British Broadcasting Corporation) jusqu’à vendredi 15 novembre au soir pour se plier à ses demandes, sans quoi il réclamera au service public britannique un milliard de dollars. Ses trois exigences : le retrait du documentaire, des excuses immédiates pour les déclarations « fausses, diffamatoires, désobligeantes et mensongères » qui lui ont été attribuées, et des compensations « appropriées », rapporte notre correspondante à Londres, Émeline Vin. Donald Trump affirme avoir subi « des dégâts financiers et réputationnels majeurs ».

La menace de poursuites sur le sol britannique paraît assez mince, puisque le documentaire a été diffusé il y a plus d’un an. Mais la Maison Blanche pourrait décider d’entamer des poursuites aux États-Unis, si elle parvient à prouver que l’émission y a été accessible. Le président américain, en guerre ouverte contre la presse, a multiplié les menaces et actions en justice contre des médias américains. Certains ont accepté de lui verser des millions de dollars pour qu’il retire ses plaintes.

La BBC promet de « renforcer » le contrôle des règles éditoriales

La BBC a indiqué « examiner la lettre » et a assuré qu’elle va « y répondre directement en temps voulu », a fait savoir un porte-parole, sans autres précisions. Lundi 10 novembre, le président du groupe audiovisuel, Samir Shah, a présenté ses excuses pour le montage du documentaire incriminé. Le médiateur du groupe a reçu plus de 500 plaintes à ce sujet en une semaine.

« La BBC souhaite s’excuser pour cette erreur de jugement », a écrit Samir Shah dans un courrier à la commission parlementaire britannique de la Culture et des Médias. Il a promis de « renforcer » le contrôle des règles éditoriales au sein du groupe, mais a aussi défendu le travail de son groupe, qui a produit ces dernières années « des milliers d’heures d’un journalisme remarquable ».

La patronne démissionnaire de BBC News a, elle, réaffirmé qu’il n’y avait « pas de partialité institutionnelle » sur sa chaîne, à l’origine du magazine « Panorama ».

La classe politique sévère avec la BBC

La classe politique britannique a quasi-unanimement critiqué la BBC pour sa gestion de l’affaire. Celle-ci tombe mal pour le groupe audiovisuel, qui doit renégocier d’ici fin 2027 son contrat de mission décennal avec le gouvernement.

À droite, la presse conservatrice a mené une campagne offensive contre le radiodiffuseur britannique. La cheffe du Parti conservateur, Kemi Badenoch, appelle carrément à « couper des têtes » à la suite des révélations « ​​​​​​​choquantes ». Le nationaliste Nigel Farage, proche de Donald Trump, défend une cure d’amaigrissement de la BBC : il prône un recentrage sur le divertissement et les sports, avec un service par abonnement, transformant la BBC en un genre de Netflix du service public.

Le gouvernement travailliste à Downing Street s’est toutefois montré catégorique : non, le service public n’est pas corrompu, ni « ​​​​​​​institutionnellement biaisé », comme l’avait accusé le président américain. Le porte-parole du Premier ministre Keir Starmer a souligné que le gouvernement soutenait « ​​​​​​​une BBC forte et indépendante ». « ​​​​​​​La BBC a un rôle vital dans une ère de désinformation », a-t-il ajouté. Mais le gouvernement appelle néanmoins l’institution à « ​​​​​​​maintenir une haute qualité » et à « ​​​​​​​corriger ses erreurs rapidement ».

Ailleurs dans l’opposition, le patron des Libéraux démocrates (LibDem), Ed Davey, appelle les autres élus à protéger la BBC, au nom de la défense de la démocratie contre des interférences étrangères. « ​​​​​​​La BBC n’appartient pas à Donald Trump », écrit-il dans une lettre ouverte.

La direction de la BBC doit organiser une réunion géante avec tous les employés dans la journée.

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