C’est Vladimir Poutine qui a allumé la mèche avec deux annonces. D’abord celle de la finalisation des essais d’un missile très longue portée à propulsion nucléaire, pratiquement impossible à intercepter selon le président russe, puis avec celle de l’essai d’un drone sous-marin à propulsion et à charge nucléaire. Réaction immédiate de Donald Trump : ordonner la reprise des essais nucléaires américains, arrêtés en 1992 par George W. Bush. Il rappelle aussi qu’il a déployé un sous-marin nucléaire lanceur d’engins capable d’atteindre la Russie, ce qui est la norme, la raison d’être d’une partie de sa flotte. Il est à noter que le président américain a fait cette annonce juste avant son entretien avec le président chinois Xi Jinping jeudi, ce qui constitue aussi un message.
C’est surtout une manière d’apporter une réponse aux annonces de Vladimir Poutine, qui lui-même envoie des messages : il annonce de nouvelles armes alors que le président américain lui demande d’arrêter la guerre en Ukraine. C’est un classique de la rhétorique du président russe d’agiter la menace nucléaire depuis le début l’invasion. D’un point de vue technique, les États-Unis n’ont pas vraiment besoin d’essais nucléaires. Cela fait longtemps qu’ils sont passés à la simulation et détiennent des quantités de données pour améliorer leur arsenal.
Les États-Unis en retard
Si le président américain fait cette annonce, c’est parce qu’il doit montrer quelque chose. Les États-Unis se sont lancés plus tard dans le développement de nouvelles armes que leurs rivaux russes et chinois. Ceux-ci ont lancé depuis plusieurs années le développement de missiles hypersoniques et ils sont capables de les utiliser. La Russie l’a fait en Ukraine, avec un succès discuté puisque Kiev parvient à les intercepter. Ce sont surtout les vagues massives de drones de moins haute technologie qui font mal aux Ukrainiens. La Chine, elle, a montré ses missiles hypersoniques lors d’un important défilé militaire à Pékin début septembre.
Les États-Unis ont testé un missile de ce type, le Dark Eagle, l’été dernier. Mais on est encore loin de la mise en service. Quant au lancement du « golden dome », le dôme d’or, capable d’intercepter n’importe quel missile au-dessus de l’Amérique du Nord, cela tient pour l’instant surtout de l’effet d’annonce.
La fin de la réduction des arsenaux nucléaires
C’est l’accélération d’une nouvelle course aux armements. La France a lancé son propre programme de missiles hypersoniques. Elle vient aussi de commencer le déploiement de son missile intercontinental M51.3, pour armer ses sous-marins nucléaires lanceurs d’engins. Lors de sa tournée asiatique, Donald Trump a donné son accord pour s’équiper en sous-marins à propulsion nucléaire à la Corée du Sud, inquiète des développements de l’armement atomique de son voisin du nord. Avec l’accord Aukus, les États-Unis se sont associés à la Grande-Bretagne pour équiper l’Australie avec de tels engins.
Dans son dernier rapport annuel, le Sipri, l’institut international de recherche pour la paix de Stockholm affirmait que le mouvement de réduction des armements nucléaires observé depuis des années touchait à sa fin, et était même en passe de s’inverser. Le Sipri estime le nombre d’ogives nucléaires existantes dans le monde à plus de 12 000, dont près de 4 000 sont actuellement déployées, majoritairement par la Russie et les États-Unis.