La nouvelle stratégie américaine de sécurité, un choc pour les Européens

La Maison Blanche, lundi 1er décembre 2025, à Washington.
La Maison Blanche, lundi 1er décembre 2025, à Washington.© Julia Demaree Nikhinson / AP

C’est une chose de l’entendre de loin en loin dans un discours de campagne, c’en est une autre de le voir synthétisé par écrit. Noir sur blanc, il est donc indiqué que les États-Unis n’ont plus l’intention d’être comme le « géant Atlas » qui soutient l’ordre mondial sur ses épaules, mais veulent plutôt se concentrer sur leurs intérêts immédiats. Et le premier de ces intérêts, c’est la domination américaine dans ce qu’aux États-Unis, on appelle l’hémisphère occidental, autrement dit sur le continent américain dans son ensemble, Amérique latine comprise. L’idée est celle d’un retour à la doctrine Monroe de 1823, qui veut que ce qui est au sud est considéré comme la chasse gardée des États-Unis. Cela éclaire d’un jour nouveau l’actuel déploiement de force américain dans les Caraïbes et au large du Venezuela, qui, rappelons-le, dispose des plus importantes réserves de pétrole de la planète.

Un redéploiement qui ressemble à un repli

Le reste du monde vient après. On a beaucoup parlé depuis les années Obama du pivot asiatique des États-Unis. C’est désormais peut-être à relativiser. La Chine est toujours vue dans ce document comme un rival, mais surtout sur le plan économique. Malgré les revendications chinoises bien connues sur Taïwan, la présidence américaine réaffirme son soutien au statu quo, et dit vouloir mettre en place une force militaire dissuasive, mais en demandant à ses alliés japonais et sud-coréens d’en faire plus et de s’engager davantage pour la défense de Taïwan. L’Afrique, qui ne doit plus s’attendre à recevoir beaucoup d’aide américaine, est vue comme comme un fournisseur de matières premières et de minerais rares, l’actuelle obsession américaine. Quant au Proche-Orient, le désintérêt américain n’est même pas masqué, puisque les États-Unis expliquent qu’une fois la région stabilisée, ils trouveront leurs sources d’énergie dans leur voisinage immédiat.

Soutien à l’extrême droite européenne

Le gros choc, il est surtout pour les Européens. L’Europe risque « l’effacement civilisationnel » d’ici une vingtaine d’années dit le document, si sa trajectoire idéologique n’est pas corrigée. La stratégie dit explicitement qu’il faut aider l’Europe à le faire en soutenant des partis qui partagent les valeurs des États-Unis de Donald Trump. Autrement dit, des partis européens d’extrême droite, comme l’avait dit le vice-président JD Vance en février lors de la conférence de Munich. Ce n’est donc pas une surprise. L’Allemagne, par la voix de son ministre des Affaires étrangères affirme ne pas avoir besoin de conseils venant de l’extérieur. En revanche la cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas semble toujours persuadée que les États-Unis restent le plus grand allié de l’Europe.

Conforme à la vision russe

Il y a des dirigeants qui ont lu et compris ce document, ce sont ceux de la Russie. Selon le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov, la stratégie de sécurité américaine est globalement conforme à la vision du Kremlin. C’est vrai sur le plan idéologique, notamment sur la vision de l’Europe et son déclin civilisationnel, mais aussi sur le non-élargissement de l’Otan, inscrit noir sur blanc. C’est un message limpide à l’Ukraine, au moment où elle négocie avec les États-Unis les conditions de la paix, sur la base de propositions soufflées par le pays qui continue à l’agresser et qui est vu comme un futur partenaire à gros potentiel par la présidence américaine.

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