
La victoire de Donald Trump dans la guerre des droits de douane commence à se profiler – au moins à court terme. Dans les derniers jours avant la date limite du 1er août, les plus grosses économies du monde se sont précipitées pour trouver des accords commerciaux, même désavantageux, avec le premier importateur mondial. En moins d’une semaine, Washington a obtenu la signature du Japon, de l’Union européenne et de la Corée du Sud.
Les gains immédiats sont évidents pour Donald Trump. Depuis la mise en place des droits de douane de base à 10 % début avril, les recettes douanières des États-Unis ont bondi : rien qu’au mois de juin, le pays a encaissé 27 milliards de dollars, trois fois plus qu’en 2024 à la même période.
Donald Trump a en revanche acté l’échec des négociations avec plusieurs représentants du Sud global comme l’Inde et le Brésil. Pour tous les pays qui n’ont pas réussi à négocier, des droits de douane pouvant aller jusqu’à 50 % pourraient s’appliquer automatiquement le 7 août.
Pour vous aider à mieux comprendre les relations commerciales selon Donald Trump, RFI a mis à jour la liste des conditions tarifaires appliquées aux principaux partenaires des États-Unis.
Les pays qui se sont accordés avec les États-Unis
- Chine (30 % en vigueur) – accord de principe depuis le 11 juin
Le « Liberation Day » de Donald Trump avait instauré une taxe de base de 34 % sur les produits chinois, déclenchant une brève guerre commerciale durant laquelle Trump annonçait des droits de douane atteignant 145 % sur les exportations chinoises, tandis que la Chine répliquait avec 125 % de tarifs douaniers sur les biens américains.
Les deux puissances ont mis fin à l’escalade le 12 mai, lorsque Donald Trump a annoncé une trêve avec la Chine : les droits de douane américains ont été abaissés à 30 %, et Pékin a réduit les siens à 10 %. Ces taux sont toujours en vigueur aujourd’hui, alors que les États-Unis poursuivent les négociations autour d’un accord de principe esquissé un mois plus tard, le 12 juin.
Rien de définitif n’est signé à ce stade. Pékin et Washington discutent et espèrent s’entendre sur un accord dès le 12 août. Avec 16,5 % des biens importés aux États-Unis provenant de l’Empire du Milieu, la Chine – premier exportateur vers le marché américain – représente de loin le dossier le plus sensible pour Donald Trump. Face à un Xi Jinping tenace, Donald Trump ne pourra peut-être pas obtenir des conditions aussi avantageuses que celles concédées par ses autres partenaires commerciaux.
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- Union européenne (15 %) – accord de principe depuis le 27 juillet
L’accord annoncé par Donald Trump et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen le 27 juillet a provoqué des réactions mitigées à travers l’Union. Certains dirigeants européens se veulent même optimistes quant à la possibilité d’améliorer les termes de l’accord. « Ce n’est pas la fin, a déclaré le président français Emmanuel Macron à ses ministres. L’Europe ne se voit pas encore suffisamment comme une puissance. Pour être libre, il faut être craint. Nous ne l’avons pas été assez. »
Comme pour la Chine, aucun accord juridique n’a été signé entre les deux blocs.
Condition sine qua non pour l’Europe, certaines catégories stratégiques bénéficient d’une exemption des droits de douane. C’est le cas des exportations des secteurs de l’aéronautique, des semi-conducteurs, des produits chimiques et des médicaments génériques. En échange, l’UE s’est engagée à acheter pour 750 milliards de dollars d’énergie américaine sur trois ans et à investir 600 milliards de dollars dans l’économie américaine.
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- Japon (15 %) – accord signé depuis le 23 juillet
Le Japon est parvenu à réduire ses droits de douane de 25 % à 15 % en signant un accord commercial avec les États-Unis le 23 juillet. Tokyo a notamment obtenu des conditions préférentielles pour son industrie automobile.
Ce secteur essentiel pour l’économie japonaise a longtemps fait obstacle aux négociations. Autre sujet de crispation : l’augmentation des importations de riz américain, que Tokyo a accepté en limitant le volume.
Donald Trump a décrit l’accord comme « potentiellement le plus gros jamais fait » en référence à une promesse d’investissements japonais aux États-Unis à hauteur de 550 milliards d’euros, somme dont les États-Unis seraient, selon lui, « bénéficiaires à 90 % ».
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- Vietnam – accord de principe flou depuis le 2 juillet
Donald Trump annonçait fièrement un accord avec le Vietnam sur son réseau Truth Social le 2 juillet, imposant 20 % de droits de douane au pays d’Asie du Sud-Est.
Hanoï aurait aussi accepté de porter les droits de douanes à 40 % pour les biens qui transitent par le Vietnam (venant de Chine par exemple) pour ensuite être exportés vers les États-Unis.
Selon Politico, les négociateurs vietnamiens s’attendaient à des droits de douane de 11 % sur leurs exportations et le président Trump aurait annoncé le chiffre des 20 % sans les consulter.
Depuis, ni la Maison Blanche, ni Hanoï n’ont communiqué officiellement sur cet accord, laissant même planer des doutes sur son existence.
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- Corée du Sud (15 %) – accord signé depuis le 29 juillet
La Corée du Sud a conclu un accord formel avec les États-Unis le 29 juillet, à seulement deux jours de la date butoir fixée par Washington. Séoul a accepté un tarif de 15 % sur ses exportations vers les États-Unis, tout en obtenant des exemptions importantes pour ses produits électroniques, notamment les semi-conducteurs et les écrans OLED.
En échange, la Corée du Sud s’est engagée à accroître ses achats de gaz naturel américain et à encourager ses grandes entreprises comme Samsung et Hyundai à investir massivement dans des usines aux États-Unis.
Le secteur portuaire a également joué un rôle central : Donald Trump, qui craint une perte de compétitivité américaine, avait demandé une coopération accrue dans ce domaine. En marge de l’accord, plusieurs groupes sud-coréens avaient annoncé des investissements dans la modernisation de terminaux portuaires aux États-Unis, notamment en Californie et en Géorgie.
Selon le ministère sud-coréen du Commerce, l’accord devrait « préserver la compétitivité de l’économie sud-coréenne tout en consolidant la relation stratégique » avec les Américains.
- Corée du Sud (15 %) – accord signé depuis le 29 juillet
La Corée du Sud a conclu un accord formel avec les États-Unis le 29 juillet, à seulement deux jours de la date butoir fixée par Washington. Séoul a accepté un tarif de 15 % sur ses exportations vers les États-Unis, tout en obtenant des exemptions importantes pour ses produits électroniques, notamment les semi-conducteurs et les écrans OLED.
En échange, la Corée du Sud s’est engagée à accroître ses achats de gaz naturel américain et à encourager ses grandes entreprises comme Samsung et Hyundai à investir massivement dans des usines aux États-Unis.
Le secteur portuaire a également joué un rôle central : Donald Trump, qui craint une perte de compétitivité américaine, avait demandé une coopération accrue dans ce domaine. En marge de l’accord, plusieurs groupes sud-coréens avaient annoncé des investissements dans la modernisation de terminaux portuaires aux États-Unis, notamment en Californie et en Géorgie.
Selon le ministère sud-coréen du Commerce, l’accord devrait « préserver la compétitivité de l’économie sud-coréenne tout en consolidant la relation stratégique » avec les Américains.
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- Royaume-Uni (10 %) – accord de principe depuis le 8 mai (cadre général, détails en cours)
Le Royaume-Uni était le premier État à s’entendre avec son allié principal, dès le 8 mai. Le cadre de l’accord prévoit des droits de douane de base de 10 % sur les exportations britanniques, ainsi que diverses exemptions pour des produits tels que l’automobile et l’aérospatiale.
Mais comme pour beaucoup d’autres pays, les discussions se poursuivent pour en définir les détails. Le Premier ministre Keir Starmer a été reçu ce lundi 28 juillet dans l’une des résidences écossaises de Donald Trump pour continuer les négociations.
Parmi les sujets abordés figuraient la forte réduction des droits de douane américains sur l’acier et l’aluminium britanniques, déjà acceptée par Washington, ainsi que la taxe britannique sur les services numériques américains, que Trump souhaite voir disparaître.
Les pays qui n’ont pas d’accord commercial avec les États-Unis
- Canada (35 %) et Mexique (30 %) – Voisins difficiles
Malgré des économies étroitement liées, Washington n’a toujours pas conclu d’accord avec ses voisins. Le Canada est menacé de 35 % de droits de douane, et le Mexique de 30 %. Ce dernier a obtenu, le 31 juillet, trois mois supplémentaires pour trouver un terrain d’entente avec les États-Unis.
Un certain nombre de produits mexicains et canadiens devraient rester protégés des taxes américaines par l’accord de libre échange signé en 2018 entre les trois pays (qui a modifié l’accord de libre-échange nord-américain signé en 1994).
Un contexte politique particulièrement tendu rend difficile les négociations avec le Canada. Depuis le début de son mandat, Donald Trump ne s’entend pas avec son voisin du nord, qu’il traite de 51ème État américain. L’annonce de la reconnaissance par Ottawa en septembre de l’État de Palestine est un nouvel obstacle à la signature d’un accord entre les deux pays. Le 31 juillet, le président américain s’est plaint sur son réseau Truth Social qu’il serait « très difficile » de trouver un accord suite à cette décision politique.
« Nous n’avons pas vraiment eu de chance avec le Canada. Je pense qu’ils vont payer ce que nous allons leur imposer. Ce n’est pas vraiment une négociation », a déclaré Donald Trump dans la foulée.
Le Canada était en 2024 le troisième fournisseur des États-Unis (412,7 milliards de dollars). La même année, les exportations américaines vers le Canada ont atteint 349,4 milliards de dollars.
Le Mexique, voisin du sud honni par Donald Trump qui l’accuse régulièrement d’être la source de tous les maux des États-Unis – et notamment de faciliter l’entrée de fentanyl, une drogue qui fait des ravages parmi les Américains depuis une dizaine d’années – a pourtant une importance économique de taille. Il est le deuxième plus gros exportateur de biens vers les États-Unis. Donald Trump a annoncé ce jeudi s’être entendu avec son homologue mexicaine Claudia Sheinbaum pour prolonger de trois mois la trêve entre les deux pays.
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- Brésil (10%) et Inde (25%) – Politique
Le Brésil et l’Inde, tous les deux membres du groupe économique des Brics, ont fait l’objet d’attaques vigoureuses du président américain.
Donald Trump a longtemps menacé le Brésil des droits de douane les plus élevés (50 %), s’insurgeant notamment des poursuites dont fait l’objet son proche, l’ex-président d’extrême droite Jair Bolsonaro, accusé de coup d’État. Sur Truth Social, ce dernier n’hésite pas à s’attaquer au président brésilien actuel, Luiz Inácio Lula da Silva. Ce dernier est l’un des rares chefs d’État à tenir tête ouvertement à Donald Trump, promettant lors d’une cérémonie officielle à Brasilia de « défendre […] la souveraineté du peuple brésilien face aux mesures annoncées par le président des États-Unis ».
Difficile à ce stade de comprendre les motivations de Donald Trump, mais à la surprise générale, le président américain a finalement ramené le taux brésilien à 10%, un niveau comparable à l’Australie et à la Grande Bretagne, deux alliés indéfectibles de Washington.
L’Inde, en revanche, est notamment pénalisée pour sa proximité avec la Russie. Le revirement récent du président américain sur le dossier ukrainien a abouti à l’annonce de sanctions contre la Russie début août si Moscou ne stoppe pas son offensive, mais aussi d’une pénalité supplémentaire contre l’Inde – d’un montant non précisé – sanctionnant l’achat de pétrole russe. Malgré les pressions de Donald Trump, le Premier ministre Narendra Modi, qui dépend électoralement des énormes lobbies et syndicats de fermiers du pays, refuse pour l’instant d’ouvrir le marché agricole de l’Inde aux produits américains.
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- Afrique du Sud (30 %) et Lesotho (15 %)
Le Lesotho, petit pays de 2,3 millions d’habitants contenu dans le territoire sud-africain, a également craint un temps de devoir face aux foudres de Donald Trump. Très dépendant de l’accord AGOA, qui accordait un accès commercial favorable à certains pays, il a été un menacé de droits de douane de 50 %. Finalement, la taxe a été ramenée à 15% comme pour la plupart des pays africains à l’exception de l’Afrique du Sud et de l’Algérie (30% chacun). Le Lesotho a exporté pour près de 240 millions de dollars de biens vers les États-Unis en 2024. Inquiet de voir son secteur textile totalement déstabilisé et face à l’imminence d’une crise de l’emploi chez les jeunes, le pays avait déclaré l’état d’urgence le 9 juillet.
L’Afrique du Sud, menacée de 30 % de droits de douane, fait également face à de virulentes critiques politiques de Donald Trump. Le président et son mouvement MAGA (Make America Great Again, soit « rendre sa grandeur à l’Amérique ») accusent le gouvernement sud-africain de racisme, voire de génocide anti-Blanc. Les États-Unis ont même accueilli à ce titre 59 fermiers blancs sud-africains, principalement des Afrikaners, qui se disaient victimes de discrimination raciale.